Vancouver

Vancouver est la plus grande ville de la Colombie-Britannique (545 671 habitants en 2001) alors que le Grand Vancouver est la troisième ville en importance au Canada (1 986 965 habitants en 2001). Située sur une péninsule au sud-ouest de la province, Vancouver occupe une superficie de 113 km2 délimitée au nord par l'anse Burrard, le détroit de Georgie à l'ouest et le fleuve Fraser au sud. Les cimes enneigées des montagnes côtières au nord de la ville offrent un cadre saisissant.

Bien avant l'arrivée des explorateurs anglais et espagnols en 1792, des peuples des Premières Nations occupaient la région. Le village de Musqueam, sur le bras nord du fleuve Fraser (actuellement le sud-ouest de Vancouver) était un grand centre d'où les Musqueam rayonnaient pour pêcher le poisson dans les eaux voisines. En poussant plus loin, vers l'anse Burrard et la crique False, ils rencontraient les peuples Coastal Salish occupés aux mêmes activités. Les Blancs, attirés par la ruée vers l'or dans les années 1850 et 1860, ont fondamentalement perturbé ce mode de vie.

Dégâts de l'incendie de Vancouver de 1886, photographiés le lendemain. UBC BC288/1

La construction de scieries dans les années 1860 sur les deux rives de l'anse Burrard ont marqué les débuts de l'industrialisation et la décision du Canadian Pacific Railway (Canadien Pacifique, à partir de 1968) de faire de l'endroit le terminus occidental de son chemin de fer transcontinental a accéléré le changement. Le gouvernement provincial avait appuyé cette mesure en accordant à la compagnie plus de 25 km2 des terres locales. La législature incorpora la Ville de Vancouver le 6 avril 1886, un nom choisi par William van Horne, cadre supérieur du CP en l'honneur de l'explorateur britannique George Vancouver. Deux mois plus tard, le 13 juin, la nouvelle agglomération subit un terrible épisode lorsqu'un feu de clairière dégénéra et détruisit en moins d'une heure la plus grande partie de la ville. La reconstruction ne se fit cependant pas attendre.

Vancouver connut plusieurs cycles d'expansion, dont des flambées de croissance de 1897 à 1906 et de 1908 à 1912, et une récession précédant la Première Guerre mondiale. Le retour à la croissance dans les années 1920 aboutit au rattachement de Vancouver-Sud et de Point Grey en 1929, faisant ainsi de Vancouver la plus grande ville de l'Ouest canadien devant Winnipeg. Des difficultés survinrent cependant dans les années 1930 et ce n'est que depuis le début de la Seconde Guerre mondiale, et de la prospérité subséquente, que la ville a connu une longue période de croissance économique relativement soutenue.

Le premier modèle de boom et de faillite dénotait la dépendance de Vancouver à l'égard de l'activité provinciale minière, forestière et des pêches dont elle était devenue le centre régional au début du 19e siècle. Son exceptionnelle situation portuaire en faisait un centre de transit important pour la navigation côtière, transpacifique et, avec deux chemins de fer transcontinentaux en 1915, le transport terrestre. Le secteur manufacturier était toutefois déficient et les grandes scieries des années 1960, en bordure du fleuve Fraser et de la crique False, témoignaient que la ville était toujours tributaire des ressources naturelles environnantes.

C'est à cette époque que Vancouver commence à changer son image de " village au bout de la forêt tropicale " et à ressembler à une grande ville. Le West End, où se concentrait l'élite, a vu les demeures familiales vétustes remplacées par des gratte-ciel résidentiels pour devenir le quartier le plus densément peuplé du pays. Des dizaines de tours à bureaux ont changé la physionomie du centre-ville alors que les scieries et ateliers d'usinage de la crique False fermaient pour permettre la construction de condominiums dans les années 1970. La ville, dont la moitié de la population de la région métropolitaine vivait toujours dans le centre en 1971, a vu construire trois nouveaux ponts au-dessus de voies navigables et un tunnel sous le bras sud du fleuve Fraser, permettant de la sorte le développement des banlieues de maisons individuelles entourant désormais un centre de plus en plus densément peuplé de célibataires et de familles. Ceux-ci peuvent continuer à y vivre grâce aux efforts de militants locaux et de réformateurs urbains, déployés en 1967, visant à empêcher sa destruction par l'aménagement d'autoroutes.

Entre les années 1960 et 1990, Vancouver est devenue une ville internationale affranchie de sa dépendance à l'égard des ressources locales et davantage axée sur le commerce, le tourisme et l'activité financière avec les pays du Pacifique. Le succès éclatant de l'Exposition universelle de 1986 a accentué cette évolution et accru les investissements asiatiques dans le Grand Vancouver. La population d'origine asiatique a considérablement crû à la fin des années 1980 et au début des années 1990, avec la création, dans la banlieue de Richmond, d'un nouveau centre commercial chinois rivalisant avec le quartier chinois historique. Les immigrants de Hong-Kong et de l'Inde constituaient alors les deux groupes asiatiques les plus importants dans une mosaïque de peuples qui contribuent au caractère cosmopolite de la ville. Le nouveau Vancouver contraste fortement avec la ville majoritairement britannique et anglo-canadienne du passé : plus de 60 % de la population du Grand Vancouver se réclamait toujours d'ancêtres britanniques en 1971. La ville a également rompu avec une longue histoire d'antipathie raciale de sa composante européenne à l'encontre des minorités autochtones et non blanches, notamment asiatiques, une hostilité qui avait culminé en 1907 avec les émeutes des quartiers chinois et japonais, l'incident du Komagata Maru en 1914 et l'expulsion de résidants japonais de la côte en 1942. Les nouveaux arrivants d'autres pays asiatiques, d'Afrique, du Proche ou Moyen-Orient, de l'Europe de l'Est, de l'Amérique latine et d'ailleurs au Canada ont également enrichi la trame culturelle caractéristique de Vancouver par leurs langues ainsi que leurs traditions culinaires et artistiques.

Malgré une croissance rapide durant le dernier tiers du 20e siècle, Vancouver passe généralement pour une ville décontractée dont les habitants prennent le temps de se consacrer aux loisirs et aux divertissements. Le tourisme a toujours été un pilier économique du fait la douceur du climat, du cadre magnifique et des possibilités de randonnée, d'escalade, de ski, de planche à neige, de canotage, d'équitation, de natation, de ramassage d'épaves et d'ornithologie. Des jardins publics et des parcs gigantesques bordent des quartiers densément peuplés (parcs Queen Elizabeth et Stanley, entre autres) et la population assiste à de nombreux événements en plein air tels que le festival de musique folk de Vancouver, la course de bateaux-dragons, Molson Indy Vancouver, le festival Shakespeare Bard on the Beach, le festival pour enfants de Vancouver, la Symphonie du feu, les festivités du Nouvel An chinois et un festival annuel de lanternes organisé par la société Public Dreams. Concerts, danse, littérature, théâtre et sport complètent une vie culturelle que viennent enrichir une nouvelle bibliothèque publique complétée en 1995, l'édifice de la Société Radio-Canada, l'aquarium de Vancouver, deux universités (universités de la Colombie-Britannique et Simon Fraser), l'institut d'art et de design Emily Carr, plusieurs campus de collèges communautaires ainsi que des archives municipales fondées par le maire J.S. Matthews, un service essentiel qui se trouve au milieu d'un grand parc donnant sur la mer et abritant également le H.R. MacMillan Space Centre et le musée maritime de Vancouver.

Tous ne partagent pas le mode de vie branché vanté par les promoteurs de la ville. Ainsi l'est du centre-ville (Downtown Eastside), qui jouxte les quartiers historiques chinois et Gastown, est devenu le plus pauvre du pays. La toxicomanie, le crime, la prostitution, l'itinérance et d'autres problèmes d'une ville moderne sont à leur point culminant dans ce petit district de 16 000 habitants, même si on les retrouve partout ailleurs. Vancouver éprouve par ailleurs de sérieuses difficultés liées à une croissance rapide, notamment des embouteillages de plus en plus grands et une détérioration de la qualité de l'air et de l'eau. Le débat sur l'avenir de la ville, entamé il y a quelques années, n'en est devenu que plus urgent. Le célèbre architecte vancouvérois Arthur Erickson exhorte ses cocitadins à s'attendre à une croissance spectaculaire et prévoit que Vancouver sera en 2040 une mégapole de 10 à 25 millions d'habitants. D'autres souhaiteraient freiner cette expansion et retrouver le cachet d'antan caractérisé par une faible densité de logements, des quartiers paisibles, des rues tranquilles et des chauffeurs polis. Mais avec une préférence pour le développement démontrée par les autorités presque tout au long de l'histoire, secondées en cela par le gouvernement provincial et ses activités de mise en valeur précédant l'Exposition de 1986, et vu l'intégration de plus en plus marquée des économies de l'Asie et de l'Amérique du Nord, le passage de " village urbain " à ville-monde devrait se poursuivre.

Encyclopedia of British Columbia, sous la direction de Daniel Francis, Harbour Publishing, Madeira Park, Colombie-Britannique, 2000. Traduction : Jean-Philippe Trottier, avec l'aimable autorisation de l'éditeur.